RHETORIQUE ALIMENTAIRE (SUITE ET FIN) - du 06 SEPTEMBRE 2014 (J+2089 après le vote négatif fondateur)
Le 17 décembre 2008 le Conseil municipal refusa textuellement un hypermarché au Charmoy en répondant NON à la question : « Etes vous favorable à l’implantation d’une grande surface supérieure à 1000 m² à dominante alimentaire sur la zone du Charmoy ? ». Ce vote fut d’ailleurs accueilli comme tel dans Le Bien Public qui titra le 19 « UNE NOUVELLE GRANDE SURFACE LE CONSEIL MUNICIPAL DIT « NON » ». À moins de s’asseoir sur la norme INSEE NAF 2008 définissant les types de grandes surfaces et/ou de considérer les journalistes comme des idiots, il semblait difficile de faire dire à ce vote ce qu’il n’avait pas dit. Pourtant, comme vous le savez, cela fut fait et sans délais !!
Toujours soucieux de réunir des preuves écrites de la manoeuvre « discrète » qui permit de passer du refus textuel d’un hypermarché au Charmoy par le vote négatif du 17 décembre 2008, à l’accueil en fanfare de cet hypermarché fin mars 2009, nous avons passé encore une fois au crible tous les textes disponibles.
Et, contre toute attente, nous avons fait une nouvelle découverte…Précisément dans le PV du Conseil municipal du 26 février 2009 !
Sachant que l’Auxonnais(e) est, par définition, « toujours très occupé(e) » (ce qui laisse les coudées franches à nos édiles) nous reproduisons ici le passage qui a retenu notre attention. Le lecteur/trice motivé(e) ou dubitatif/ve pourra se reporter à l’original :
« 2 questions ont été posées par la liste « Ensemble Autrement » :
[N.D.L.R. Nous ne mentionnons ici que la deuxième de ces questions, la seule à concerner notre sujet] : « Implantations d’entreprises : quels sont les moyens aujourd’hui utilisés par la commune, pour faire connaître auprès des entreprises potentiellement candidates à une implantation les possibilités et disponibilités foncières ? [N.D.L.R. C’est nous qui soulignons] » […]
[N.D.L.R. Et voici la réponse]
« 2ème question : la ville n’engage rien car il n’y a pas de terrain à proposer aux entreprises. Il y a un travail sur la zone d’activités à Villers-les-Pots et à Tillenay. Pour le moment la modification du PLU de Villers-les-Pots n’est pas engagée pour des raisons budgétaires. Par ailleurs, il y a la zone du Charmoy. Une entreprise a fait une proposition pour s’implanter à Auxonne avec moins de mille mètres carrés alimentaires. [N.D.L.R. C’est nous qui soulignons] […] La réponse négative du Conseil Municipal à la question posée en décembre 2008 « Etes vous favorable à l’implantationd’une grande surface supérieure à 1000 m² à dominante alimentaire sur la zone du Charmoy ? » [N.D.L.R. C’est nous qui soulignons] ne signifie pas un refus de toute grande surface, il faut pouvoir se développer. Par ailleurs, M. le Maire a rappelé aux commerçants lors de leur dernière assemblée générale qu’il n’appartenait pas à une collectivité de favoriser telle ou telle enseigne et à ce sujet, la question a été posée par écrit aux services de la Préfecture. »
[Source : PV du Conseil municipal du 26 février 2009 INFORMATION DE M. LE MAIRE Questions diverses pages 2 et 3]
Remarquons tout d’abord que la question posée le 17 décembre est ici rapportée conformément au PV, et sans inversion des termes « supérieure à 1000 m² » et « à dominante alimentaire », comme dans la délibération. Il se peut donc que l’inversion subtile que nous avions repérée dans certaines transcriptions, et que nous supposions avoir été intentionnelle car elle peut permettre, dans une certaine mesure, un détournement de sens, n’ait été au bout du compte qu’un « lapsus » parmi d’autres. La subtilité, en effet, ne paraît plus de mise dès lors qu’il semble que l’on va s’asseoir carrément sur la question… ainsi que sur sa réponse, d’ailleurs !
Si comme le dit le texte cité plus haut : « La réponse négative du Conseil Municipal à la question posée en décembre 2008 […] ne signifie pas un refus de toute grande surface » elle ne permet pas pour autant, selon ses termes et en bonne logique, « l’implantation d’une grande surface supérieure à 1000 m² à dominante alimentaire » donc a fortiori d’un HYPERMARCHÉ. Rappelons encore ici que, selon la norme, un HYPERMARCHÉ est une grande surface à prédominance alimentaire d’une superficie supérieure à 2500 m².
On peut donc s’étonner que, dans le même temps où il rappelait la réponse négative donnée lors du vote du 17 décembre, Monsieur le Maire d’Auxonne, dont pourtant « la ville n’engage rien car il n’y a pas de terrain à proposer aux entreprises », s’activait sur le terrain avec ses adjoints à livrer 19 hectares à une entreprise pour lui permettre d’y implanter, entre autres, un HYPERMARCHÉ, grande surface à prédominance alimentaire d’une superficie supérieure à 2500 m². C’est bien LECLERC, on l’aura compris, cette « entreprise [qui] a fait une proposition pour s’implanter à Auxonne avec moins de mille mètres carrés alimentaires ». Oui, c’est LECLERC cette « entreprise qui veut s’implanter à Auxonne avec moins de mille mètres carrés alimentaires », litote pour le moins curieuse et inhabituelle pour désigner un hypermarché et sa séquelle de boutiques et qui pourrait tout aussi bien s’appliquer à l’épicerie du coin de la rue ! Ce discours amphigourique n’était-il pas destiné à enfumer et à gagner du temps ? Quand la « maîtrise foncière de la zone » fut assurée, la vérité toute nue put éclater au grand jour dans la presse, en mars, puis dans Inf’Auxonne N° 25 en mai !
Ce numéro d’Inf’Auxonne, exceptionnellement dense pour une feuille d’images habituellement inconsistante et sans grand contenu, étonne ! La rédaction, appuyée sans doute, pour l’occasion, par le renfort de quelques maîtres dans l’art de chantourner les dossiers, a fait vraiment très fort. Elle n’a pas rougi, par exemple, d’écrire en page 2, donc juste en regard du plan figuré en page 3, plan « dernier cri » du projet comportant explicitement un HYPERMARCHÉ , les arguties et contre-vérités suivantes :
« M. le Maire a soumis la question suivante à l’appréciation des élus : « êtes-vous favorable à l’implantation d’une grande surface à dominante alimentaire supérieure à 1000 m² sur la zone du Charmoy ? » [N.D.L.R. la question comporte ici la fameuse inversion par rapport au PV] 21 élus de la majorité ont alors répondu NON, ceux de l’opposition refusant de prendre part au vote.
Très réactif, le Groupe LECLERC a alors modifié son projet qui, depuis 2005 et jusqu’au vote, comportait une « grande surface à prédominance alimentaire » (cf analyse économique évoquée plus haut). Après examen, l’avant-projet modifié s’est avéré intégralement conforme aux prescriptions de différentes natures en vigueur, notamment aux restrictions votées, aux orientations d’aménagement intégrées au PLU etc. […]
Le Maire a-t-il, comme les opposants au projet le prétendent, changé d’avis ?
NON. Sa position a évolué avec le dossier lui-même. En effet, initialement « à prédominance alimentaire », le projet a ensuite subi des adaptations majeures pour le mettre en adéquation avec le vote du17/12/2008.
Le plan reproduit dans l’exemplaire numérique d’Inf’Auxonne N° 25 étant peu lisible, nous mettons à votre disposition une photo de l’exemplaire papier
Constatez ! La « grande surface à prédominance alimentaire » est bien toujours là sur ce plan daté d’avril 2009 et, sur ce même plan, elle comporte d’ailleurs la légende explicite : « HYPERMARCHÉ VENTE 4000 M² ». ! Quelle réactivité, quelle évolution et quelle « adéquation avec le vote du17/12/2008 » !! Et surtout quels tours de passe-passe rhétoriques dans l’argumentation !
N. B. : Les bonnes lectures étant constamment rares à Auxonne, ne manquez pas, très prochainement, nos « notes de lecture alimentaires » de l’ouvrage-évènement de Valérie Trierweiler !
C.S. Rédacteur de Chantecler,
Auxonne, le 06 Septembre 2014 (J+2089 après le vote négatif fondateur)