GAZ DE KYSTE - du 24 novembre 2012 (J+312 après la CNAC)
Il est curieux de noter comme les commentaires relatifs à l’affaire de Notre-Dame des Landes ont opéré récemment un glissement sémantique vers le vocabulaire médical. Dans notre article du 19 courant nous osions un « Notre-Dame des Glandes » et hier, avec une toute autre intention, le Premier Ministre Manuel Valls martelait « il est hors de question de laisser un kyste s’organiser » en référence à l’occupation du site par les opposants au projet de haut-vol de Jean-Marc de Nantes.
Dans un entretien du 22 courant à Paris-Match, ce dernier avait déclaré « Notre-Dame des Landes est un projet d’intérêt général et pas un projet personnel. Il se fera ». Il convenait donc « dans l’intérêt général » de faire sauter « le kyste ».
Dans notre article d’aujourd’hui nous voudrions illustrer, sur des exemples locaux, le caractère très relatif des concepts de « kyste » et d’ « intérêt général » en matière de projets de soi-disant « développement ».
Le temps est un juge impitoyable, vous en jugerez vous-même. En 1966, l’ « intérêt général » du moment à Auxonne consistait à raser la ville en grande partie pour la transformer en une cité de barres. A cette fin, il fallait d’abord démolir l’îlot de l’arsenal inhabité pour y édifier une cité de relogement. Pour empêcher cette folie j’écrivis alors un article dans Le Bien Public daté du 13 mai 1966 : « Si la nécessité de donner à chacun un logis décent est une chose bien admise, elle ne justifie pas une décision aussi irraisonnée [celle de démolir l’Arsenal] qui relève, dirait-on, d’une méconnaissance totale de la valeur esthétique et sentimentale des vestiges du passé, ou, ce qui est plus grave, d’une outrecuidance qui fait bon marché de notre patrimoine …» Cette fougue un peu maladroite valut au rédacteur de vingt ans quelques réponses peu amènes de la part des « messieurs ».
Je réalise maintenant avec effroi que j’étais alors un élément du « kyste » empêchant la sacro-sainte « modernisation » de notre ville. Les détails de toute l’histoire et de ses suites dans notre siècle sont disponibles en ligne dans Le Courrier de l’Arsenal.
Aujourd’hui l’« intérêt général » à Auxonne, c’est l’édification d’un hyper sur la zone du Charmoy en contradiction totale avec les déclarations de Madame Nathalie Kosciusko-Morizet « Et en même temps je vois qu’il y a encore des demandes de capacité pour des ouvertures, alors qu’il me semble qu’on est déjà très, très capacitaire. Moi, ça me soucie énormément ! Parce qu’il faudrait pas un jour qu’on se retrouve, après avoir des friches industrielles à gérer, avec des friches commerciales avec tout ce que ça représente en termes de zones de non-droit, de risque de violence etc…. et puis, tout simplement, de dégradation de l’environnement.
« Je veux dire, c’est pas la peine d’avoir pris des champs pour aller construire de grands hypers et un jour se retrouver avec là-dessus les mêmes problèmes qu’on a déjà sur nos terrains pollués ! »
NKM serait-elle donc, elle aussi, un « kyste » ? Et alors tout se comprend ! Ne serait-ce pas pour la faire pleurer en pénitence qu’on fit naguère hommage à la Dame d’un sac de bulbes dans notre cité ?
Et pourtant, me direz-vous l’« intérêt général », outre qu’il a été proclamé par la municipalité dans ses publications, puis soutenu sans ménagement par une débauche d’affiches imprimées à LURE a été reconnu au bout du compte par la CNAC (917 D du 17 janvier 2012) qui déclare que le projet « [situé] à proximité de zones d’habitat[…] participera à l’animation de la vie urbaine et rurale ».
Voilà qui pourrait sembler clair, et pourtant, la même CNAC, à propos d’un précédent projet comprenant le même hyper de 3500 m² à peine plus éloigné du centre-ville (« On a déplacé le site de deux cents mètres pour le rapprocher du rond-point et de la route départementale », commente Jocelyne Raymond » dans Le Bien Public du 13 janvier 2011) avait opposé son refus (317 D du 20 janvier 2010) au motif que « [le projet] en limite de zone agglomérée sur des parcelles agricoles […] ne manquera pas de nuire à l’animation urbaine de l’agglomération d’Auxonne ». Les voies de l’« intérêt général » semblent, dans le cas présent, pour le moins impénétrables.
Il est possible que le confort des chiroptères pépères ait pesé sur la décision, sans doute avec d’autres facteurs d’« intérêt général », et il serait grand temps que les « kystes » de tout poil (et à plumes) irrespectueux de cet « intérêt général » soient réduits au silence. En masse !!! Et au gaz de « kyste » si nécessaire !!!
C. S. Rédacteur de Chantecler,
Auxonne, le 24 novembre 2012 (J+312 après la CNAC)