QUAND LE JEUNE BONAPARTE CONSULTAIT LE DOCTEUR TISSOT DE GENÈVE- du 26 août 2021 (J+4635 après le vote négatif fondateur)
À suivre les réseaux sociaux, nos fidèles lecteurs auront pu constater qu’il y a du Bonaparte dans l’air.
La rédaction de Chantecler, qui suit l’air du temps, et qui ne voudrait pas être en reste, interrompt donc la publication de ses « cahiers de vacances » pour offrir à ses lecteurs, dans la tonalité de ses « cahiers de vacances », un petit intermède sur le jeune Bonaparte, la médecine et la santé.
CAHIERS DE VACANCES À CHARMOY-CITY : VACCINATION ET HISTOIRE (5) - du 25 août 2021
De l’air auxonnais, de nos jours encore réputé humide, et qui l’était encore beaucoup plus il y a quelques siècles, lorsque la ville était cernée de zones marécageuses, le futur empereur se plaignait des miasmes.
Dans une lettre à sa mère, datée du 12 janvier 1789, il écrit ainsi :
« Ma santé, qui est enfin rétablie, me permet de vous écrire longuement. Ce pays-ci est très malsain, à cause des marais qui l’entourent et de fréquents débordements de la rivière qui remplissent tous les fossés d’eau exhalant des vapeurs empestées. J’ai eu une fièvre continue pendant certains intervalles de temps et qui me laissait ensuite quatre jours de repos, venait m’assiéger de nouveau pendant tout autant de temps [N.D.L.R. : sans doute une des nombreuses formes de « fièvre intermittente » en honneur dans les nosographies de l’époque]. Cela m’a affaibli, m’a donné de longs délires et m’a fait souffrir une longue convalescence. […] »
(Cité par le Commandant Maurice Bois dans Napoléon Bonaparte lieutenant d’artillerie à Auxonne, Paris, Flammarion, 1898, pp. 47-48. Le commandant Bois signale en note à ce propos que la situation perdure à son époque et qu’il espère beaucoup du comblement prochain des fossés !).
Le jeune Bonaparte, sans être hypocondriaque, était donc très soucieux de sa santé et de son hygiène, c’est ainsi que depuis « les montagnes de Corse où l'on se sert peu de médecin », il n’hésite pas à consulter, par lettre envoyée sur le continent, l’un des plus célèbres médecins de l’époque.
Ce médecin suisse, le Docteur Samuel Auguste Tissot (1728-1797), ami et médecin de Jean-Jacques Rousseau et de têtes couronnées, connaît une grande notoriété. Ses ouvrages (Avis au Peuple sur sa santé, L’Onanisme, De la santé des gens de lettres) connaissent un grand succès. Ils sont lus et traduits dans toute l’Europe.
C’est donc un an environ avant de découvrir Auxonne que Bonaparte écrit d’Ajaccio, le 1er avril 1787, une longue lettre au Docteur Tissot au sujet… de la goutte dont souffre son grand-oncle Lucien Bonaparte, archidiacre d’Ajaccio.
Dans cette lettre, Bonaparte n’omet pas de conclure en passant sur sa propre santé et se dit « tourmenté d’une fièvre tierce » dont les accès justifieraient le peu de lisibilité de son « griffonnage » ! En Corse, comme à Auxonne, si l’on en croit du moins ses écrits, la santé du jeune Bonaparte n’était pas vraiment florissante !
C’est à la moitié du premier séjour en Corse de Bonaparte (Septembre 1786-septembre 1787) que la lettre fut envoyée. Ce premier séjour concluait huit longues années passées sur le continent, dans les écoles militaires, d’Autun à Paris en passant par Brienne, et pour finir au régiment de la Fère à Valence.
La lettre fut conservée, mais Tissot n’y répondit pas, se contentant de l’archiver avec la mention « Lettre non répondue, peu intéressante ».
Il ne faut pourtant jamais désespérer. Un demi-siècle plus tard, Charles Eynard publiera la lettre de Bonaparte dans son ouvrage Essai sur la vie de Tissot, Lausanne, 1839.
Les curieux ne manqueront pas de prendre connaissance de la dizaine de pages que consacre Eynard à cet épisode médical de la vie du jeune Bonaparte.
N.B. : C’est à Paoli que fait référence Bonaparte en écrivant au début de sa lettre : « il est vrai que l’éloge court et glorieux que vous avez fait des leur aimé général ». Paoli est « l’aimé général » des Corses.
Les curieux ne manqueront pas de prendre connaissance de la dizaine de pages que consacre Eynard à cet épisode médical de la vie du jeune Bonaparte. N.B. : C’est à Paoli que fait référence Bonaparte en écrivant au début de sa lettre : « il est vrai que l’éloge court et glorieux que vous avez fait des leur aimé général ». Paoli est « l’aimé général » des Corses.
C.S. Rédacteur de Chantecler,
Auxonne, le 26 août 2021 (J+4635 après le vote négatif fondateur)
Publié dans Visions d’histoire