Buffonneries en tous genres – du 18 avril 2012
Dans notre précédent article, nous déplorions l’utilisation, devenue à présent cosmétique et opportuniste, d’un discours prétendument écologiste en ces termes : « tout projet habilement ficelé comporte un couplet développement durable énoncé en formules stéréotypées répondant aux clichés convenus ».
Une lecture attentive du dernier Inf’Auxonne n° 36 que nous avons découvert aujourd’hui ne nous permet pas de démentir notre propos, bien au contraire !
Avant de passer, suivant en cela l’exemple du grand Buffon, à quelques considérations d’histoire naturelle, remarquons en préalable qu’aucune mention n’est faite explicitement, dans les colonnes de la présente feuille auxonnaise, du projet LECLERC et de son acceptation par la CNAC le 17 janvier dernier.
Un œil exercé remarquera toutefois cette information en page 1 : « la réfection de la RD 905, du rond-point de la poste au rond-point de l’Europe [est] une opportunité ». Opportunité qui fut propre, sans doute, à obtenir le « feu vert » de la CNAC en faveur du projet LECLERC !
Relisons en effet le quatrième attendu de la CNAC en page 2 de sa décision N° 917D du 17/01/12 :
« CONSIDÉRANT que les aménagements sur la RD 905 permettront aux piétons et aux cyclistes d’accéder au site en toute sécurité ; qu’en outre, dans le cadre de la poursuite du réaménagement de cet axe routier, la piste cyclable créée en 2010 sera prolongée jusqu’à la ZA du Charmoy ; »
A la bonne heure ! On comprend alors que, toujours selon la CNAC : « les flux de circulation supplémentaires générés par le projet seront absorbés sans difficultés », d’autant plus que selon les rédacteurs du dossier « …, le projet aura un impact positif sur la qualité de l’air grâce à la maîtrise de l’évasion de la clientèle » (p. 53 du dossier).
Dans le cadre des « impacts positifs » ( !?) sur l’environnement, ce n’est pourtant pas un hypermarché que l’on nous annonce dans Inf’Auxonne n° 36 mais une « frayère à brochets ». Encore un arbre qui cache la forêt. Tout est donc pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles. Les chiroptères du Charmoy et les ésocidés du Port-Royal ne connaîtront pas la crise ! Protégeons les espèces menacées sans oublier les espèces sonnantes. Non ! Pas les crotales !
Annonçant, en janvier dernier, l’admission du recours de LECLERC en CNAC, Raoul Langlois soulignait déjà fort opportunément le rôle déterminant du facteur écologique : « L’aspect environnemental a fait la différence au niveau du vote final. La société s’est notamment engagée à préserver un ruisseau et à respecter quelques contraintes architecturales ». (Cité dans un communiqué du Bien public du 19 janvier dernier sur la toile).
Le Bief Pérou s’est révélé, pour le coup, un vrai Pactole ! A charge de revanche, il conviendrait bien de rendre à ce ruisselet les méandres paresseux dont témoignent les anciennes cartes du temps où le génie rural ne sévissait pas encore. Auxonne va avoir sa frayère ; alors, pas de jaloux, il faut une grenouillère au Charmoy, après le phare de la grande distribution, des nénuphars sur le Bief Pérou : CNAC ! CNAC ! COUAC !
D’autant plus que les grenouilles de la « vieille Saône » et autres amphibiens en plein frai risquent d’avoir bien du mal à se remettre des coups de pelle du printemps 2012 ! Il est vrai que l’on nous rétorquera que l’on ne peut faire d’omelette sans casser d’œufs ! N’empêche, l’ondine de la petite Saône, pas si « vieille » qu’on le dit, en a déjà mal à son nénuphar !
C. S. Rédacteur de Chantecler,
Auxonne, le 18 avril 2012