NAPOLÉON D’AUXONNE À LA POLOGNE (3) - du 16 juillet 2022 (J+4959 après le vote négatif fondateur)
Dans le dernier épisode paru de notre série, nous annoncions : « nous examinerons plus en détail les circonstances qui conduisirent l’Empereur à opérer un « repli » vers le sud ouest après la bataille d’Eylau ainsi que les conséquences qui en résultèrent. ».
NAPOLÉON D’AUXONNE À LA POLOGNE (2) - du 06 juillet 2022
Tel est donc le programme que nous tenterons d’esquisser schématiquement aujourd’hui.
Dans le tome 2 de l’Histoire militaire de la France (sous la direction d’André Corvisart, PUF, 1992), à la suite de la description de la bataille d’Eylau (8 février 1807), on peut lire ce texte en page 349 :
« Napoléon tente de poursuivre les Russes mais est contraint d’y renoncer à cause des fatigues de l’armée et de l’impossibilité d’acheminer son ravitaillement. C’est d’ailleurs à ce moment qu’il prend la décision de militariser les équipages. L’armée se replie et prend ses quartiers d’hiver. »
Tout est dit dans ces quatre lignes. C’est ce repli qui conduira l’Empereur à Osterode où, entre de multiples décisions de tous ordres, il concrétisera par un décret impérial sa « décision de militariser les équipages ».
Il convient toutefois, dans un souci d’objectivité, loin des rivalités d’uniforme et de l’« esprit de bouton », de ne pas grossir démesurément le précédent fait. Ce serait en effet regarder l’histoire par le petit bout de la lorgnette. Nous serons sans doute amené à revenir ultérieurement sur ce point.
Foin donc, de l’« esprit de bouton » et de son histoire ad hoc !
Faisons place à une histoire plus objective comme a su la conter avec talent Adolphe Thiers, d’une large et talentueuse plume, dans sa monumentale Histoire de l’Empire.
Et reportons nous, à cet effet, au premier tome de cette œuvre dans sa version illustrée (Paris, Lheureux, 1865).
À propos de la décision de Napoléon de suspendre un temps sa campagne contre les Russes,Thiers y souligne : « C’est assurément un spectacle imposant et instructif que celui de ce général impétueux [...] porté d’un seul bond du Rhin à la Vistule, s’arrêtant tout à coup devant les difficultés des lieux et des saisons, s’enfermant dans un espace étroit […] et sachant ajourner [le] coup au moment où la nature des choses le rendrait sûr et possible » (p. 402 )
Cette sage décision d’ajournement n’apaise pas pour autant la fougue combative de l’Empereur qui confie à Joséphine, dans une lettre d’Osterode (où il séjourne depuis le 21 février) datée du 19 mars 1807 : « Dès que le printemps paraîtra j’espère bien laver la tête aux Russes... »
C’est presque l’été qu’il devra en fait attendre, car de la mi-février, jusqu’au début du mois de juin suivant qui verra leur entrée dans une nouvelle campagne, l’Empereur et son armée, resteront dans leurs quartiers à l’intérieur d’un quadrilatère restreint entre Vistule et Passarge décrit ainsi par Thiers dans l’ouvrage cité plus haut :
« Napoléon vint donc se placer entre la Passarge et la basse Vistule [suit la répartition de ses divers corps d’armée] le quartier général et la garde à Osterode, dans une position centrale, où Napoléon pouvait réunir toutes ses forces en quelques heures » (p. 402 )
La définition géographique de cet espace, défini par Thiers d’après la carte représente une superficie équivalente à la moitié de celle de l’actuelle Côte d’Or. Nos lecteurs pourront en prendre connaissance d’après le PDF ci-dessous réalisé par nos soins d’après l’œuvre de Thiers.
Dans un prochain épisode, nous illustrerons, d’après l’ouvrage de Thiers et la correspondance de l’Empereur, les conditions de séjour de l’Empereur et de son armée dans ces cantonnements.
En attendant, et pour conclure cet article, Claudi vous offre, comme toujours, son illustration du jour.
Si dans notre bonne cité impériale on nous répète haut et fort qu’Osterode fut un haut lieu de la logistique, n’oublions pas pour autant que le séjour de l’Empereur à Osterode fut aussi pour lui l’occasion d’une commande numismatique.
Pour célébrer son séjour à Osterode et l’immortaliser en profil impérial et romain, il commanda à Vivant Denon, patron du Louvre, une médaille établissant visiblement un parallèle entre la halte raisonnée et momentanée de la marche impériale vers l’Est et la tactique prudente du général Fabius Cunctator lors des guerres puniques contre Hannibal.
Féru d’histoire romaine, comme d’autres aujourd’hui se déclarent férus d’histoire napoléonienne, notre Empereur visiblement, comme ses fans d’aujourd’hui chez nous, ne se mouchait pas vraiment du pied.
C.S. Rédacteur de Chantecler,
Auxonne, le 16 juillet 2022 (J+4959 après le vote négatif fondateur)
Visions d’histoire