LE POIDS DES MOTS (5) - du 16 SEPTEMBRE 2015 (J+2464 après le vote négatif fondateur)
Dans notre dernier article, nous avions livré un échantillonnage de l’argumentaire-bateau selon lequel, l’installation de grandes surfaces en périphérie boosterait les commerces traditionnels de centre-ville. Ces discours péremptoires ne résistent pas à l’examen de la situation réelle ! La CNAC, relativement au projet auxonnais du Charmoy, ne déclarait-elle pas elle-même le 20 janvier 2010 que le projet aurait « un impact significatif sur l’activité des commerces et services traditionnels situés en centre-ville » et dès lors « ne manquerait] pas de nuire à l’animation urbaine de l’agglomération d’Auxonne ». Il est vrai que postérieurement, elle finit par se…raviser.
Après le discours de « colère du maire de Pusey », motivé par le refus de la zone commerciale Oasis 3 en CDAC, il nous restait à entendre le discours-jumeau d’Yves Krattinger président du Conseil général de Haute-Saône. Ce discours sera donc notre sujet du jour.
Prononcé le même jour, 19 septembre 2014, que le discours de « colère du maire de Pusey », dans la même salle à PUSEY, et pour la même occasion (inauguration de la bretelle), le discours d’Yves Krattinger constitue le pendant modéré des propos véhéments du premier magistrat de PUSEY. De ce discours, comme du précédent, il nous reste un témoignage vidéo réalisé par La presse de Vesoul.
On pourra donc vérifier sur pièces, que, tout comme son homologue jurassien le Président Clément Pernot, maire de Champagnole, le président du Conseil général de Haute-Saône ménage en quelque sorte la chèvre et le chou puisque, tout en reconnaissant la nécessité de soutenir les centres-villes historiques, il regarde avec bienveillance l’installation d’enseignes en zone périurbaine.
Tout comme nous avions donné une transcription écrite du discours de « colère du maire de Pusey », nous offrons à nos fidèles lecteurs/trices une transcription de cet autre discours qui se veut un discours d’équilibre et de bon sens. Discours de bon sens en effet, car ne va-t-il pas dans le sens des promoteurs de grandes surfaces comme le démontrerait, s’il en était besoin, le vote du Conseil général à la CDAC du 20 juin 2014, seul vote positif en faveur d’OASIS 3 avec celui du maire de PUSEY, contre 6 votes défavorables.
Prononcé à l’occasion de l’inauguration d’un équipement routier, ce discours est néanmoins tout entier consacré au problème de la dualité commerciale centre-ville-périphérie. Moins fleuri que celui du maire de PUSEY, quoique non dépourvu d’un certain naturel et même parfois d’une saveur prononcée de terroir, le propos ne manque pas d’intérêt dans sa valeur d’exemple. Nous avons tenté de le retranscrire le plus fidèlement possible, en y apportant, pour la bonne compréhension de nos lecteurs/trices, quelques précisions en note. Voici donc :
http://www.dailymotion.com/video/x269j4v_oasis_news
« Discours prononcé à PUSEY par le Président du Conseil général de la Haute-Saône à l’occasion de l’inauguration de la bretelle » (Texte retranscrit par nos soins d’après la vidéo de La Presse de Vesoul)
« Les grandes enseignes appellent des publics, et si elles sont pas présentes, les publics en question vont ailleurs. Si vous avez pas par exemple, dans le sport, des magasins pointus qui vendent des équipements d’aujourd’hui, et les équipements, ils vont de bricoles etc…à des gros équipements, et tout ce qu’il faut, que ce soit dans le vélo, que ce soit dans le sport de montagne, que ce soit dans le ski, que ce soit dans n’importe quoi, les gens, ils vont… Besançon, clair et net.
De toute façon, moi je suis près de Besançon, ça m’arrive d’aller à Besançon chercher des équipements, quand j’ai besoin de quelque chose le samedi. Bon. J’y vois autant de Haut-Saônois que si je viens ici. C’est pas compliqué, c’est comme ça. Quand les Bisontins appellent une zone les Portes de Vesoul, c’est pas naïf, parce que tous les Haut-saônois qui passent là disent : « Bah ! C’est les Portes de Vesoul, on est même presque en Haute-Saône, quoi ! ».
Faut pas oublier que quand « les Saveurs de la Ferme » se sont créées à Valentin [N.D.L.R. Chantecler : dans la banlieue de Besançon], ce sont tous des gens qui produisent en Haute-Saône, presque tous, et qui sont allés là-bas, pour choper le flux qui va vers Besançon. Si y’avait pas de flux, ils n’iraient pas là.
Je pense, voilà, je pense que nous devons trouver tous ensemble des chemins pour aller tous ensemble vers le développement. Ça veut pas dire qu’il y a pas une bataille à mener pour consolider le centre-ville de Vesoul. D’ailleurs, dans le contrat PACT que nous avons adopté, qu’a été adopté par la communauté d’agglomération de Vesoul, y a beaucoup d’argent qui est mis pour sur le centre-ville, dans le PACT, et on est d’accord. On a discuté avec Monsieur le Maire, Monsieur le Député-maire de Vesoul, on a parlé, on est d’accord. On a dit, c’est vrai qu’il faut faire des opérations, y a des problématiques de logements, de qualités de logements, de parking, etc…
C’est normal. Il faut les entreprendre, il faut bonifier le centre-ville, il faut pas l’abandonner, ça serait une erreur historique de l’abandonner. Tout le temps qu’on ne fait rien, c’est un temps qui s’accumule contre le centre-ville. Donc il faut agir.
Mais, en même temps, il faut capter ; et certaines enseignes ne vont pas dans les centres-villes, parce qu’elles demandent trop de parking, trop…
Vous comprenez, quand vous ressortez avec un vélo, c’est pas facile d’aller le chercher au milieu de Vesoul. Vous allez toujours le chercher à l’extérieur. Si vous ressortez avec des skis, c’est exactement pareil, c’est comme ça, y’arrive un moment c’est comme ça.
Donc moi je pense qu’on doit travailler tous pour que à la fois jouer la carte des portes d’agglomération, pour qu’elles captent un maximum de clientèle et ça renforcera la ville de chef-lieu, la ville de chef-lieu elle est quand même située au milieu de la Haute-Saône, ce qui est un atout pour elle, mais évidemment tout ce qui est loin peut subir des attractions extérieures ; mais c’est pas en disant aux gens : « Venez ! Vous n’irez qu’au centre-ville », qu’on fera venir des gens qui sont déjà saisis par des attractions extérieures.
Donc moi, je pense qu’on doit trouver à la fois une réponse pour le centre-ville, qu’est pas du tout à mépriser, et des réponses périphériques et vous l’avez évoqué. Donc, moi, bon y’a une instance [N.D.L.R. Chantecler : la CDAC], c’est, je la respecte. En même temps, c’est vrai…. que de faire..
Faut qu’on trouve les compromis nécessaires pour avancer, aussi bien en périphérie qu’au centre. Je suis très heureux quand même que tout ça soit débattu quand même lucidement, enfin discuté, entre vous.
Et puis je suis toujours heureux d’inaugurer un équipement [N.D.L.R. Chantecler : la bretelle] finalement pas très coûteux, 350 000 euros au total, 360 000 ou quelque chose comme ça TTC, et qui en fait est extrêmement opérationnel et apprécié de tous. Moi, les retours que j’ai, alors je les ai par élus que je rencontre ou par des gens :
« Ah ! Ben au fait, Président– ou « grand », vous savez comme c’est, ou « Kratt » – Ah ! Ben alors c’que vous avez fait à Pusey, c’est bien ! Ah ! Ça alors, c’était quand même con [inaudible]. Voilà ce qui disent les gens : « C’était quand même con ». Mais là, c’est bien »
Claudi, qui a récemment acheté un vélo au centre-ville d’Auxonne, rue Antoine Masson, chez un commerçant récemment implanté, offrant un choix, des prix et des services très intéressants, ne partage pas ce jugement hâtif de « Kratt » :
« Vous comprenez, quand vous ressortez avec un vélo, c’est pas facile d’aller le chercher au milieu de Vesoul. Vous allez toujours le chercher à l’extérieur. Si vous ressortez avec des skis, c’est exactement pareil, c’est comme ça, y’arrive un moment c’est comme ça. »
Venez donc acheter votre vélo au centre-ville d’Auxonne, Monsieur le Président, et comme votre homologue jurassien, Monsieur Clément Pernot, vous pourrez même faire un tour en tandem avec notre maire jusqu’au Charmoy !
C.S. Rédacteur de Chantecler,
Auxonne, le 16 septembre 2015 (J+2464 après le vote négatif fondateur)